regards d'enfants, suite
Un
arbre au milieu d’un pré, en été. Sur ses branches, des vêtements de toutes les
couleurs, percés. Du rouge, jaune, vert, bleu. Chemises, pantalons, tee-shirts,
bonnets, etc. D’un coup un enfant surgit de la forêt en contrebas du jardin. Il
est bientôt rejoint par une dizaine de petites têtes blondes sous un ciel bleu.
Et les voilà qui grimpent sur l’arbre, l’un après l’autre. Comme des petits
singes habiles qui s’emparent méticuleusement des vêtements. Chacun
trouve sa branche, puis agite ces étoffes dans l’air chaud du soir devant
un photographe caché derrière son appareil. « Maintenant c’est le jeu du
silence. On ne bouge plus. Je ne veux voir que des feuilles trembloter, et rien
de plus. »
*
La
maison qui brûle et cette phrase entêtante qui hante le fond de ma gorge :
« et dire que je n’ai pas eu le souci de boire. »
*
Je
descends l’escalier de la maison de vacances en Bretagne, ma grand-mère prépare
un « petit frichti » ; j’entre en douce dans la cuisine, j’ai 7 ans,
je suis affamé, j'ouvre la bouche, « qu’est-ce que cette odeur qui
me sourit au nez ? », et la voilà qui se retourne vers moi pour me donner
un baiser sur le front en silence. (La porte de la cuisine s'ouvrait sur le
jardin saturé d’hortensias. Après le déjeuner, j'accompagnais mon arrière
grand-père Marcel pour donner des graines aux oiseaux dans le jardin. Nous ne nous disions rien. Et
je trouvais qu'il n'y avait jamais assez d'oiseaux pour nous. Hirondelles,
moineaux, pigeons blancs.)